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570 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

diables ; il fallait essayer d'aimer pour connaître ensuite toutes les raisons de détester. C'est en pénétrant le dessein même de M. Bernstein que nous mesurerons la grandeur de son échec ; car la critique des intentions est stérile. Or M. Bernstein s'est proposé de représenter les conflits des temps nouveaux, d'apporter à notre époque les héros qu'elle attendait, de leur donner la vie, la force et la grandeur : — ce but, il ne l'a pas atteint.

Pour ce public moderne d'intention, qui porte sous forme simplifiée ses règles de conduite, refuse de s'attarder à la réflexion oiseuse, et ne veut plus connaître de fatigue, M. Bernstein a créé un théâtre de faits. (En vérité, l'âme des géné- rations modernes est assez difi^érente de l'image qu'il nous en trace ;je la crois plus multiple, plus décentralisée, et moins superstitieuse ; mais il ne s'agit pas de s'égarer sur ce que M. Bernstein eût pu écrire...)

Dans les drames que nous relisons, le dialogue, embarrassé, ne commence à vivre qu'en se hachant de plus en plus : c'est lorsque l'on arrive aux monosyllabes, aux exclamations entrecoupées, qu'on rejoint le ton et le mouvement de la vie. Ce langage tend vers le silence, les qualités qu'elle exige de l'acteur tendent vers celles du mime. Quand les héros ne parlent pas par gestes, ils nous entretiennent de leurs gestes. Le discours

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