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ISABELLE 37

I

J'ai presque peine à comprendre aujourd'hui l'impatience qui m'élançait alors vers la vie. A vingt-cinq ans je n'en connaissais rien à peu près, que par les livres ; et c'est pourquoi sans doute je me croyais romancier ; car j'ignorais encore avec quelle malignité les événements dérobent à nos yeux le côté par où ils nous intéresseraient davantage, et combien peu de prise ils offrent à qui ne sait pas les forcer.

Je préparais alors, en vue de mon agrégation, une thèse sur la chronologie des sermons de Bossuet ; non que je fusse particulièrement attiré par l'éloquence de la chaire : j'avais choisi ce sujet par révérence pour mon vieux maître, Albert Desnos, dont l'importante " Vie de Bossuet " ache- vait précisément de paraître. Aussitôt qu'il connut mon projet d'études, M. Desnos s'ofirit à m'en faciliter les abords. Un de ses plus anciens amis. Benjamin Floche, membre correspondant de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres, possédait divers documents qui sans doute pourraient me servir ; en particulier une Bible couverte d'annotations de la main même de Bossuet. M. Floche s'était retiré depuis une quinzaine d'années à la Quart- fourche, qu'on appelait plus communément : le Carrefour, propriété de famille aux environs de Pont-l'Evêque, dont il ne bougeait plus, où il se ferait un plaisir de me recevoir et de mettre à ma disposition ses papiers, sa bibliothèque et son érudition que M. Desnos me disait être inépuisable. Entre M. Desnos et M. Floche des lettres furent échangées. Les documents s'annoncèrent plus nombreux que ne me l'avait d'abord fait espérer mon maître ; il ne

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