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LE LIVRE DE l'aMOUR 4I5

amour crie vers lui-même ! mon trop beau, mon trop grand amour ! Longtemps je l'avais deman- dée, cette incorruptible tendresse plus profonde que les paroles ; je l'avais voulu, ce silence ; et j'ai pleuré de joie le jour où, comme un navire qui sent sous lui descendre la marée, j'ai entendu les vieilles volontés de mon être confusément se mettre en marche vers un monde nouveau. Hélas, félicité qui maintenant me dépasse ! gémissements, balbutiements devant cette grande chose vivante qui s'est logée en moi, cette bondissante, cette inexprimable lumière ! Ne m'abandonnez pas ; pareil à un homme trop riche qui descend se faire des amis dans la foule, voyez comme très pauvre- ment je vous tends les mains. Ah ! mon cœur est perdu dans l'amour sans bornes, et sa splendeur fait sa souffrance, comme le joueur de violon qui sanglote à sa note la plus pure.

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— Bonjour, Anne.

— C'est toi. Blanche }

— C'est moi. Et c'est toi aussi, toujours la même, toujours triste. Qu'as-tu ^ Tu me rappelles les vieux automnes de notre enfance, quand on se sauvait au moment du déjeuner pour pleurer dans le fond des serres. Ah ! les rues sentaient la corne roussie, les cavaliers avaient passé sous les balcons, les laboureurs partis aux champs avaient laissé

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