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LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

plutôt que bonhomie, ils composent avec elle. Par pudeur aussi, comme s’il y avait une part de louange pour soi-même dans le blâme qu’on inflige à autrui. Par malice enfin, et souci de n’être point dupe : ne serait-il pas dérisoire, en effet, de poser les questions essentielles en présence d’ouvrages si peu mûris pour la plupart, et de sembler prendre au sérieux ce qui n’est que bagatelle. Un critique dramatique, plus il a de valeur personnelle et de renom littéraire, moins il manquera d’excuses, certes, pour tenir légèrement son emploi. Le voilà qui « s’en tire » par un air de nonchalance, et même de négligence… Ou plutôt il ne s’en tire pas tout à fait. Car sa bonne foi est en jeu : vous le verrez demain défendre avec animation les pauvretés auxquelles il ne croyait hier accorder que complaisance provisoire. Pour le respect qu’il a de soi, pour feindre de ne s’être point abaissé dans sa louange, il affectera d’élever jusqu’à sa louange ce qu’elle était allée toucher trop bas. À ce point, je ne le crois plus fort éloigné de confondre, en effet, le bon et le mauvais, et de perdre en discernement ce que son caractère entreprenait de rattraper sur notre estime.

Accordons qu’il convienne d’imputer, en partie, à l’indigence des créateurs l’énervement des critiques. Mais ne voit-on pas, aussi bien, que la mollesse de ces derniers favorise étrangement la naissance, la diffusion, le succès d’une production