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I06 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

littéraires, une pluie de flèches dont la pointe semble aujourd'hui bien émoussée : le premier vers a tendu l'arc, le second décoche le trait. Mais ces jeux d'esprit sont entachés de sécheresse et de froideur didactique. Pour sentir une émotion se dégager des distiques enchaînés en longues pièces, il faut lire Alexis et Dora^ harmonieuse idylle, un peu trop concertée ; et surtout les deux véritables élégies qui portent les noms charmants d'Amyntas et d'Euphrosyne...

On sait que nos romantiques, de tout le lyrisme allemand, n'admirèrent à peu près que les ballades. Il serait ici superflu de mentionner celles de Gœthe, si elles avaient gardé toutes autant que les plus anciennes, le tour et le ton du chant populaire. En efl^et le Roi de Thulé^ le Pécheur^ le Roi des Aulnes^ sont tout simplement des lieder sur des thèmes de légende. Tout autres sont les Bal- lades composées au cours de l'an 1797, par ému- lation avec Schiller. Leurs sujets sont des songes qui, depuis fort longtemps, flottaient dans les rêveries du poète ; il les a si bien caressés, chéris d'une telle prédilection, qu'il hésite à leur donner l'essor et ne s'y résoud qu'à regret, encouragé par son ami ; mais dès qu'il ne la retient plus, l'inspi- ration soudain afflue ; il écrit en somnambule, ne prend pas le temps de redresser ses feuilles, si bien qu'au bout des lignes courant en diagonale la place manque pour la fin des vers. Toutes ses facultés

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