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850 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

1. Un gras quinquagénaire prend son chocolat du matin dans une salle à manger plaisante. La bonne apporte le courrier. La première enveloppe, en s'ouvrant, laisse apparaître le prospectus de la Donogoo-Tonka. L'homme le parcourt, sans cesser de manger ses tartines. Mais voilà que du papier, les douze lettres DonogooTonka se soulèvent, s'arrachent, s'échappent et se mettent à trotter, l'une derrière l'autre, sur la table, comme une bande de petites souris.

2. Par la vitre d'un wagon-couloir, un voyageur aper- çoit un grand panneau-réclame fuyant au long d'une prairie. SOCIÉTÉ DE DONOGOO-TONKA. Le voyageur se retourne vers le dedans du wagon ; mais son regard n'est pas déhvré et partout où il se pose, au plafond, sur les coussins, sur le tapis, apparaît soudain faiblement, comme dans la projection d'une lanterne: DONOGOO-TONKA.

3. Un homme gravit les marches d'un escalier souterrain . Sur la tranche de chaque degré : DONOGOO-TONKA. L'inscription, d'abord terne et neutre, devient plus lui- sante, plus active, de marche en marche. A la fin les lettres saillent, mordent, brûlent. L'homme tourne à demi la tête, et, à travers le crâne qui cesse d'être opaque, l'on devine la cervelle, marquée, comme l'épaule d'un bagnard, de douze petites lettres grésillantes.

4. Une vieille, crasseuse étude de notaire, dans un fond de province. Un croquant cossu demande des conseils au digne officier ministériel qui saisit, parmi les papiers de sa table, le prospectus de la Donogoo-Tonka et se met à le tapoter gravement. Mais soudain, sous le choc du doigt, le prospectus lâche un louis d'or, puis un autre ; et ainsi à chaque coup. Peu à peu le prospectus se gonfle, s'arron-

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