Page:Musset - Premières Poésies Charpentier 1863.djvu/194

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

De courir à son or sont venus l’avertir…
Malheur ! Quand la nuit vient, l’homme est fait pour dormir.

Il est certain qu’alors l’Effroi sur notre tête
Passe comme le vent sur la cime des bois,
Et lorsqu’à son aspect le cœur manque, il s’arrête,
Et saisit aux cheveux l’homme resté sans voix.

Derrière l’angle épais d’une fenêtre obscure,
Tiburce resté seul avançait à grands pas.
Aux rayons de la lune une blanche figure
Parut à son approche, et glissa dans ses-bras :
« Hélas ! après deux ans ! » dit-elle, et sa pensée
Mourut dans un soupir sur sa lèvre glacée…


V


« Qu’avez-vous, mon ami ? pourquoi ce front chagrin ?
Seigneur, me cachez-vous vos sujets de tristesse ?
Vous avez négligé de prier ce matin ;
Cher Seigneur, vous souffrez. Le mal qui vous oppresse
Me fait souffrir aussi.

Me fait souffrir aussi.— Rien, rien, dit le vieillard.
Où donc est votre fille ? Elle descend bien tard.

— Dieu du ciel ! Georgina, mon cher Seigneur, vous aime
Et vos chagrins la font souffrir comme moi-même ;
Elle pleure. Ô Smolen ! qui vous a, cette nuit,
Fait tout à coup ainsi sortir de votre lit ?
Silence ! disiez-vous ; — et cependant, pensais-je,