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À JUANA


Ô ciel ! je vous revois, madame, —
De tous les amours de mon âme,
Vous le plus tendre et le premier.
Vous souvient-il de notre histoire ?
Moi, j’en ai gardé la mémoire : —
C’était, je crois, l’été dernier.

Ah ! marquise, quand on y pense,
Ce temps qu’en folie on dépense,
Comme il nous échappe et nous fuit !
Sais-tu bien, ma vieille maîtresse,
Qu’à l’hiver, sans qu’il y paraisse,
J’aurai vingt ans, et toi dix-huit ?

Eh bien, m’amour, sans flatterie,
Si ma rose est un peu pâlie,
Elle a conservé sa beauté.
Enfant ! jamais tête espagnole
Ne fut si belle, ni si folle ; —
Te souviens-tu de cet été ?

De nos soirs, de notre querelle ?
Tu me donnas, je me rappelle,
Ton collier d’or pour m’apaiser, —
Et pendant trois nuits, que je meure,