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que du désespoir ou des mouvements de colère. Tant que je me savais aimé d’elle, j’étais bien sûr de l’aimer aussi ; l’invincible nécessité venait, pour la première fois, de se lever entre nous deux. J’en ressentais comme une langueur sourde, où je ne distinguais rien clairement. J’étais courbé près de l’alcôve, et quoique j’eusse vu dès le premier instant toute l’étendue de mon malheur, je n’en sentais pas la souffrance. Ce que mon esprit comprenait, mon âme, faible et épouvantée, semblait reculer pour n’en rien voir. « Allons, me disais-je, cela est certain ; je l’ai voulu, et je l’ai fait ; il n’y a pas le moindre doute que nous ne pouvons plus vivre ensemble ; je ne veux pas tuer cette femme, ainsi je n’ai plus qu’à la quitter. Voilà qui est fait ; je m’en irai demain. » Et, tout en me parlant ainsi, je ne pensais ni à mes torts, ni au passé, ni à