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Au retour à Paris, dans les premiers jours d’octobre, notre précepteur voulut nous quitter ; celui qui se présenta pour le remplacer était un âne avec des airs fashionables, dont l’ignorance fut bientôt percée à jour. Notre père pensait que l’éducation publique était la seule bonne pour des garçons : il me mit dans une institution. Mon frère resta dans la maison paternelle et suivit en externe libre les classes du collège Henri IV. Il n’avait que neuf ans et on le jugea de force à entrer dans la classe de sixième, ce qui prouve que les leçons de l’honnête M. Bouvrain n’avaient pas été si mauvaises. Le jour de son début au collège, l’enfant gâté fut accueilli par les huées de ses camarades. On lui avait imprudemment laissé sa belle crinière blonde et un col festonné rabattu sur les épaules. Il revint tout en larmes. Vite, il fallut lui couper les cheveux. Bien qu’il prît l’aventure au tragique, ce n’était là qu’un de ces petits déboires qui assouplissent le caractère. C’est même une expérience salutaire que de se trouver aux prises avec la raillerie et la malveillance, en sortant du giron maternel. On ne saurait apprendre de trop bonne heure à se défendre soi-même et à ne point compter sur l’indulgence des autres. Mais cette leçon fut suivie d’une épreuve plus cruelle, que bien peu de gens ont subie dans un âge aussi tendre.

Dès ses premières compositions, Alfred de Musset obtint les meilleures places et fut remarqué du profes-