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étais si habituée, que, malgré la triste façon dont elle m’en a récompensée, j’en suis au regret de ne l’avoir plus ; qui me répondra d’une autre ? Quelle confiance pourrais-je maintenant avoir pour une inconnue ?

— Le malheur qui vous est arrivé, répondit M. Després, serait à jamais déplorable s’il faisait douter de la vertu une âme telle que la vôtre. Il y a dans ce monde des misérables et beaucoup d’hypocrites, mais il y a aussi d’honnêtes gens. Prenez une autre demoiselle de compagnie, non pas à la légère, mais sans y apporter non plus trop de scrupule. Votre confiance a été trompée une fois ; c’est une raison pour qu’elle ne le soit pas une seconde.

— Je crois que vous dites vrai, répliqua madame Doradour ; mais je suis bien triste et bien embarrassée. Je ne connais pas une âme à Paris ; ne pourriez-vous me rendre le service de prendre quelques informations et de me trouver une honnête fille qui serait bien traitée ici, et qui servirait du moins à me donner le bras pour aller à Saint-François d’Assise ?

M. Després, en sa qualité d’habitant du Marais, n’était ni fort ingambe ni fort répandu. Il se mit cependant en quête, et, quelques jours après, madame Doradour eut une nouvelle demoiselle, à laquelle, au bout de deux mois, elle avait donné toute son amitié, car elle était aussi légère qu’elle était bonne. Mais il fallut, au bout de deux ou trois mois, mettre la nouvelle venue à la porte, non comme malhonnête, mais comme peu hon-