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manda fort sèchement par quel hasard il entrait ainsi. Il répondit d’un air naturel qu’il n’avait point rencontré de domestique pour se faire annoncer, et qu’il venait offrir, en toute humilité, les très humbles excuses de sa conduite.

— Et quelles excuses en pouvez-vous donner ? demanda madame de Parnes.

Le mot de méprise qui se trouvait dans le billet revint par hasard à la mémoire de Valentin ; il lui sembla plaisant de prendre ce prétexte, et de dire ainsi la vérité. Il répondit donc que la lettre insolente dont se plaignait la marquise n’avait pas été écrite pour elle, et qu’elle lui avait été apportée par erreur. Persuader une pareille affaire n’était pas facile, comme bien vous pensez. Comment peut-on écrire un nom et une adresse par méprise ? Je ne me charge pas de vous expliquer par quelle raison madame de Parnes crut ou feignit de croire à ce que Valentin lui disait. Il lui raconta, du reste, plus sincèrement qu’elle ne le pensait, qu’il était amoureux d’une jeune veuve, que cette veuve, par le hasard le plus singulier, ressemblait beaucoup à madame la marquise, qu’il la voyait souvent, qu’il l’avait vue la veille ; il dit, en un mot, tout ce qu’il pouvait dire, en retranchant le nom et quelques petits détails que vous devinerez.

Il n’est pas sans exemple qu’un amoureux novice se serve de fables de ce genre pour déguiser sa passion. Dire à une femme qu’on en aime une autre qui lui est