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Michel.

Que t’en ai-je dit ?

Fabrice.

Tout ce que le silence peut dire.

Michel.

Écoute-moi donc, maintenant que je parle. Tu es vif, prompt, toujours pressé, comme les gens qui n’ont rien à faire. Tu juges vite, de peur de réfléchir ; mais je suis dans ce fauteuil depuis hier soir, et j’ai compté les heures. Retiens ceci. L’absence de Faustine, si elle n’est pas un crime, est une ruse.

Fabrice.

Une ruse, dis-tu, dans quel but ?

Michel.

Dans le but fort clair et fort simple de faire rompre cette alliance.

Fabrice.

Le beau moyen que de se déshonorer !

Michel.

Elle sait très bien qu’il n’en sera pas ainsi. Elle sait très bien que, tous tant que nous sommes, nous serions prêts à perdre notre fortune et la vie plutôt que de voir publier notre honte. Elle sait très bien que personne dans cette maison n’ira, en pareil cas, avertir notre père, car ce serait lui donner la mort, à ce vieillard qui, après ses sequins, ne chérit que son enfant gâté. Elle se croit sûre de l’impunité, ou, si on l’accusait tout bas, penses-tu qu’une fable ou un prétexte