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qui impose aux généraux une plus grande circonspection, on croirait la nation anglaise moins propre à une guerre offensive que défensive ; à moins d’une grande supériorité de forces, comme à Toulouse, ou d’une nécessité absolue, comme à Alknaer, en 1799, ils se décident difficilement à prendre l’initiative. — Ce système leur réussit ; il est en effet à remarquer que d’Azincourt à Waterloo, toutes les batailles gagnées par les Anglais sur les Français ont été des batailles défensives ; on peut citer comme exemple, dans les dernières guerres, Vimeira, Talavera, Busago et Salamanque. Les Anglais ont l’habitude de se faire attaquer dans des positions formidables, choisies à l’avance et qu’ils savent merveilleusement défendre ; ils amènent presque constamment leur ennemi à prendre, comme on dit, le taureau par les cornes. — Encore une fois à Waterloo, les Français devaient faire aux Anglais l’espèce de guerre à la nature de leur courage. — Le plan de l’Empereur, tel que nous l’avons indiqué, se déroule avec une admirable facilité, et les événements permettent de reconnaître sans peine toutes les fautes qui sont venues le contrarier. Ce que voulait l’Empereur, c’était détruire successivement ses deux ennemis, et, sous ce rapport le système dans lequel il avait conçu la campagne de 1815 mérite tous les éloges qui lui ont été donnés : c’est par l’exécution qu’il a manqué. — Napoléon avait parfaitement jugé que son adversaire le plus sérieusement redoutable, c’était le vieux feld-maréchal Blücher. C’est à lui qu’il s’attaque d’abord pendant les journées du 15 et du 16, sans lui donner le temps de se reconnaître ; il le presse, le poursuit sans relâche, et eût infailliblement détruit l’armée prussienne, si la fatale inaction du maréchal Ney, son impardonnable faiblesse pendant toute la journée du 16 et la matinée du 17 n’eût permis à l’armée anglaise d’arriver en ligue et de venir s’interposer entre les Prussiens et les Français. Contraint d’abandonner les Prussiens pour faire tète à l’armée anglaise, le plan de l’Empereur n’est déjà plus le même ; l’importance de ses premiers succès disparaît ; cependant il espère encore pouvoir tout réparer. Le maréchal Grouchy, détaché à la poursuite des Prussiens avec les troisième et quatrième corps d’armée, la division d’infanterie du sixième et la cavalerie légère du général Exelmans, devra les presser le plus vivement que possible, les tenir toujours devant lui et les empêcher de porter secours aux Anglais. Comme Ney, par son immobilité passive seule, a empêché les Anglais de porter secours aux Prussiens pendant la bataille de Ligny, le maréchal de Grouchy devra de plus se placer dans sa marche de manière à concourir à la défaite de l’armée anglo-belge s’il y a une bataille. L’Empereur, ayant donné à Grouchy trente-six mille hommes et cent dix canons, resta en présence de l’armée anglaise avec soixante mille hommes et deux cent cinquante bouches à feu. Or l’armée anglo-belge se composait de plus de cent mille hommes avec un train d’artillerie de deux cent cinquante pièces.

Quand Napoléon arriva aux Quatre-Bras, la cavalerie anglaise, que le duc de Wellington avait chargée de couvrir sa retraite, y était encore, elle ne s’en éloigna qu’à l’approche de l’armée française. Le corps du maréchal Ney se tenait dans ses bivouacs en avant de Fresnes ; l’Empereur en fit des reproches au maréchal quand il parut devant lui ; celui-ci s’en excusa en disant qu’il avait cru que toute l’armée anglo-hollandaise occupait encore les Quatre-Bras, appuyée à sa gauche par l’armée prussienne qu’on