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le portait au milieu du danger ; couvert de plumes qui s’élevaient sur sa tête comme un clocher et tout d’or, c’était un miracle qu’il échappât tant il était facile à reconnaître à son costume. Toujours en butté au feu de tous lés ennemis, les Cosaques eux-mêmes l’admiraient à cause de son étonnante bravoure. Chaque jour, il était engagé dans un combat particulier avec quelques-uns d’entre eux, et ne revenait jamais sans avoir teint son sabre de leur sang. En campagne’, c’était un vériiable paladin ; mais si on : le prenait dans le cabinet, c’était un poltron sans jugement ni décision. Murât et Ney étaient les deux hommes les plus braves que j’aie jamais connus. Le caractère de Murât était cependant plus noble, car il était généreux et franc. Chose étrange ! Murât, malgré l’amitié qu’il me portait, m’a fait plus de mal que qui que ce soit au monde. Quand je quittai l’île d’Elbe, je lui envoyai un courrier pour l’informer de mon départ ; il prétendit qu’il devait attaquer les Autrichiens, le courrier se jeta à jes genoux pour l’en empêcher ; il me jroyait maître de la France, de la Belgique et de la Hollande, et il devait, disait-il, faire sa paix avec moi et ne pas adopter de demi-mesures ; il chargea les Autrichiens comme un fou, avec sa canaille, et ruina mes affaires ; car, dans le même temps, je faisais avec l’Autriche une négociation d’après laquelle je stipulais qu’elle resterait neutre. Ce traité était sur le point d’être conclu, et alors j’aurais régné paisiblement. Mais aussitôt que Murât attaqua les Autrichiens, l’empereur François crut qu’il n’agissait que d’après mes instructions ; et, en effet, il sera difficile de faire croire le contraire à la postérité. Metternich dit : « Oh ! l’Empereur est toujours le même ; c’est un homme de fer. Le séjour qu’il a fait à l’île d’Elbe ne l’a pas changé, rien n’est capable de le guérir : tout ou rien, voilà sa devise ! » — L’Autriche se joignit à la coalition, et ma perte fut consommée.

— « Murât ignoraitque ma conduite fût réglée d’après les.circonstances. Il était comme un homme qui regarde le changement de décorations à l’Opéra, sans jamais penser à la machine qui les met en mouvement : il n’a pas cru me faire un grand tort en se séparant de moi la première fois ; car il ne se serait pas joint aux alliés. Il calcula que je serais obligé de céder l’Italie et quelques autres pays ; mais il n’a jamais envisagé ma ruine entière. » (O’MEARA.)

— « On ne le plaindra pas : c’était un traître. Il ne m’a jamais dit qu’il fût déterminé à défendre son trône ; et jamais je ne lui ai manifesté l’intention de réunir les royaumes d’Italie et de Naples, ni de lui ôter la couronne et de le faire connétable de l’Empire : certainement, je me suis servi de lui comme d’un instrument pour exécuter de grands projets sur l’Italie, et mon intention était de déposséder Murât du trône de Naples ; mais le temps n’était pas venu, et, d’ailleurs, je lui aurais donné une indemnité convenable. Sa lettre à Macirone est d’un ridicule achevé, et son entreprise est celle d’un fou. Quel, motif avait-il de se plaindre de l’empereur d’Autriche qui s’était conduit généreusement, qui lui avait offert un asile partout où il voudrait dans ses États, et qui ne lui imposait d’autre condition que celle de ne pas les quitter sans sa permission : ce qui était très-essentiel. Dans l’état où en étaient les choses, que pouvait-il exiger de plus ? moi-même, je n’aurais jamais demandé davantage à l’Angleterre. C’était un acte de générosité de la part de l’empereur d’Autriche ; il lui rendait le bien pour le mal, car Murât avait fait tous ses efforts pour lui enlever l’Italie. » (O’MÉARA.)