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de s’avancer, sur le Pô ? Napoléon savait bien que l’Italie n’était pas la conséquence.d’une victoire en Allemagne, que c’était le corollaire du succès obtenu sur la frontière prédominante.

« Rewbel ayant eu occasion d’entretenir le premier Consul, en 1800, lui dit : « Vous réunissez une belle armée sur le Rhin ; vous avez là toutes les troupes de la France ; ne craignez-vous pas les inconvénients de mettre tant de troupes dans une seule main ? »

« Cette considération politique m’a toujours fait maintenir les deux armées de Rhin-et-Moselle et de Sambre-et-Meuse ; peut-être cet inconvénient est-il moindre vis-à-vis de vous que le soldat regarde comme le premier général. Cependant, croyez-moi, allez à cette armée vous-même ; sans cela vous eh éprouverez de grands inconvénients. Je sais que Moreau n’est pas dangereux ; mais les factieux, les intrigants de ce pays, quand ils s’attachent à un homme, suppléent à tout. »

Pendant l’armistice de Pahrsdorf, Moreau ayant fait un voyage à Paris descendit aux Tuileries ; il n’était pas attendu. Comme il était avec le premier Consul, le ministre de la^guerre, Carnot, arriva avec une paire de pistolets de Versailles, couverts de diamants d’un très-haut prix ; ils étaient destinés pour le premier Consul, qui les prit et les remit à Moreau, en disant : « Ils viennent fort à propos. » Cette scène n’était pas arrangée ; cette générosité frappa lé ministre.

« L’Impératrice Joséphine maria Moreau avec mademoiselle Hulot, créole de l’ile de France. Cette demoiselle avait une mère ambitieuse, elle dominait sa fille et bientôt domina son gendre et changea son caractère. Ce ne fut plus le même homme ; il se mêla dans toutes les intrigues ; sa maison fut le rendez-vous de tous les malveillants ; non-seulement il fit de l’opposition, mais il con^ spira contre le rétablissement du culte et le concordat de 1801 ; il tourna en ridicule la Légion-d’Honneur. Plusieurs fois le premier Consul voulut ignorer ces inadvertances ; mais enfin il dit : « Je m’en lave les mains ; qu’il se casse le nez contre les piliers du palais des Tuileries. » Cette conduite de Moreau. était contraire à son caractère ; il était Breton, détestant les Anglais, avait les chouans en horreur, une grande répugnance pour la noblesse : c’était un homme incapable d’une grande contention de tête ; il était naturellement loyal et bon vivant ; la nature ne l’avait pas fait pour les premiers rôles ; s’il eût fait un autre mariage, il eût été maréchal, duc, eût fait les campagnes de la grande armée, eût acquis une nouvelle gloire ; et si sa destinée était de tomber sur le champ de bataille, il eût été frappé par un boulet russe, prussien ou autrichien ; il ne devait pas mourir par un boulet français. » (NAPOLEON à Sainte-Hélène.)

« Moreau était le point d’attraction et de ralliement qui avait attiré la nuée de conspirateurs qui vint de Londres fondre sur Paris. Moreau ne cessa de leur dire, à leur arrivée, qu’il n’avait personne, pas même son aide-de-camp, mais que, s’ils tuaient le premier Consul, il aurait tout le monde.

« Moreau, livré à lui-même, était un fort bon homme qu’il eût été facile de conduire : c’est ce qui explique ses irrégularités. Il sortait du palais tout enchanté, il y revenait plein de fiel et d’amertume, c’est qu’il avait vu sa belle-mère et sa*femme. » (LAS CAZES.)

« Lors du jugement, la fermeté des complices, le point d’honneur dont ils ennoblirent leur cause, la dénégation absolue, recommandée par l’avocat, sauvèrent Moreau. Interpellé si les confé-


renées, les