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péril dans la petite baie que formait le rentrant du rocher.

« Alors l’ennemi réunit tousses efforts contre la petite troupe retranchée dans le ravin. Cinq fois treize ou quatorze cents Anglais vinrent se briser contre Lamarque et ses cinq cents hommes. Sur ces entrefaites la nuit arriva : c’était le moment convenu pour recommencer l’ascension. Cette fois, comme l’avait prévu le général Lamarque, elle s’opéra plus facilement que la première. Les Anglais continuaient bien de tirer, mais l’obscurité les empêchait de tirer avec la même justesse. Au- grand étonnement des soldats, cette fois l’adjudant-général Thomas monta le dernier ; mais on ne tarda point à avoir l’explication de cette conduite : arrivé au sommet du rocher, il renversa l’échelle derrière lui, aussitôt les embarcations gagnèrent le large et reprirent la route de Naples. Lamarque, pour s’assurer la victoire, venait de s’enlever tout moyen de retraite.

« Les deux troupes se trouvaient en nombre égal, les assaillants ayant perdu trois cents hommes à peu près: aussi Lamarque n’hésita point, et, mettant la petite armée en bataille dans le plus grand silence, il marcha droit à l’ennemi sans permettre qu’un seul coup de fusil répondit au feu des Anglais.

« Les deux troupes se heurtèrent, les baïonnettes se croisèrent, on se prit corps à corps ; les canons du fort Sainte-Barbe s’éteignirent, car Français et Anglais s’étaient tellement mêlés qu’on ne pouvait tirer sur les uns sans tirer en même temps sur les autres. La lutte dura trois heures ; pendant trois heures on se poignarda à bout portant. Au bout de trois heures, le colonel Hansell était tué, cinq cents Anglais étaient tombés avec lui, le reste était enveloppé. Un régiment se rendit tout entier: c’était le Royal-Malte. Neuf cents hommes furent faits prisonniers par onze cents. On les désarma, on jeta leurs sabres et leurs fusils à la mer; trois cents hommes restèrent pour les garder, les huit cents autres marchèrent contre le fort.

Cette fois il n’y avait même plus d’échelles. Heureusement les murailles étaient basses; les assiégeants montèrent sur les épaules les uns des autres. Après une défense de deux heures, le fort fut pris: on y fit entrer les prisonniers et on les y enferma.

« La foule qui garnissait les quais, les fenêtres et les terrasses de Naples, curieuse et avide, était restée malgré la nuit: au milieu des ténèbres, elle avait vu alors la montagne s’allumer comme un volcan ; mais sur les deux heures du matin, les flammes s’étaient éteintes, sans que l’on sût qui était vainqueur ou vaincu. Alors l’inquiétude fit ce qu’avait fait la curiosité ; la foule resta jusqu’au jour. Au jour, on vit le drapeau napolitain flotter sur le fort Sainte-Barbe. Une immense acclamation, poussée par quatre cent mille personnes retentit de Sorrente à Misène, et le canon du château Saint-Elme, dominant de sa voix de bronze toutes ces voix humaines, vint apporter à Lamarque les premiers remercîments de son roi.

Cependant la besogne n’était qu’à moitié faite; après être monté il fallait descendre, et cette opération n’était pas moins difficile que la première. De tous les sentiers qui conduisaient d’Anacapri à Capri, Hudson-Lowe n’avait laissé subsister qu’un escalier: or, cet escalier, que bordent constamment les précipices, large à peine pour que deux hommes puissent le descendre de front, déroulait ses quatre cent quatre-vingts marches à demi-portée de canon de douze pièces de trente-six et de vingt chaloupes canonnières.

Néanmoins-il n’y avait pas de temps à