Page:Mowat - Études philologiques sur les inscriptions gallo-romaines de Rennes.djvu/28

Cette page a été validée par deux contributeurs.
- 24 -

les rapprocher entr’eux pour en déduire la valeur idéologique de leur radical. Ainsi, le composé epo-redia nous est expliqué en ces termes par Pline (H. N., lib. III, 21) : « Eporedias Galli bonos equorum domitores vocant. » Or, on sait que le premier élément, epo, signifie incontestablement ἵππος, equus ; c’est donc au deuxième élément, redia, que se rapporte le sens de bonus domitor. En second lieu, Martial nous apprend que le ve-redus était le cheval de course, de chasse ; or, ce mot est phonétiquement identique avec le gallois go-rwydd, pour gwo-rwydd, par exemple, dans gorwyddfarch, cheval dressé. Enfin, d’après la description que Fortunat nous a laissée de la rheda gauloise, nous savons que c’était une espèce de voiture attelée à quatre chevaux, sur deux de front ; un pareil équipage suppose des animaux dociles, bien dressés, et dirigés par un habile conducteur. Le passage de Fortunat mérite d’être textuellement reproduit (Poem. III, 22) :


Curriculi genus est, memorat quod Gallia, rhedam,
Molliter incedens orbita sulcat humum.
Exsiliens duplici bijugo volat axe citato
Atque movet rapidas juncta quadriga rotas.

Des trois mots eporedia, veredus, rheda, se dégage donc, pour le radical red, l’idée de dresser, assouplir, élever, en tant qu’il s’agit de l’éducation du cheval.

Le nom des Redones est, en vertu de son radical, étroitement apparenté avec ces trois mots gaulois, avec le dernier surtout, ce qui ne veut pas dire qu’il soit synonyme de rhedarii, conducteurs des rhedae. En effet, cette espèce de véhicule paraît avoir été d’un usage trop général par toute la Gaule pour qu’il soit raisonnable d’en faire l’attribution aux seuls Redones. Je crois plutôt que, par ce dernier mot, il faut entendre un peuple adonné à l’élevage des chevaux, et renommé pour leur dressage. L’étymologie que je propose est conforme à l’idée qu’on peut se faire du genre de vie d’une peuplade gauloise ; elle nous révèle qu’à une époque reculée, l’industrie chevaline était déjà, comme elle l’est encore de nos jours, en grand honneur dans le territoire rennais.