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disait-elle, « ce jeune Duverger que nous avons reçu ici, pendant toutes les vacances de Noël, comme un ami de la famille, et le voilà qui se mêle d’être désagréable pour Arthur ! Il ne manquait plus que cela. Nous serons plus réservées avec lui, aux prochaines vacances : il restera chez lui. »

On comprend quels tourments les lettres d’Arthur et les paroles de sa mère faisaient souffrir à Marcelle. Elle ne pouvait comprendre pourquoi Louis, qui était si aimable lorsqu’il était à Saint-Augustin, se conduisait de pareille façon à l’égard de son frère.

Elle eut tout compris si elle n’avait pas été presque aussi aveugle que sa mère sur le détestable caractère d’Arthur.




CHAPITRE VI



Juin arrivait, avec ses feuillages verts, son ciel aux ardeurs tempérées, son souffle de renouveau qui fait épanouir également la nature et les cœurs ; juin, le mois des poètes et le mois de la convalescence pour les malades que les rigueurs de l’hiver ont terrassés, le mois qui apporte dans l’existence un de ces changements factices dont le retour régulier et prévu n’en cause pas moins un plaisir sensible et donne l’impression du nouveau et de l’inattendu.

Ceux qui vivent sous les climâts où les quatre saisons sont aussi tranchées que dans notre pays ont peine à croire qu’il puisse exister des endroits où le ciel est « toujours bleu » et où le printemps règne éternellement ; ils accueillent avec un égal plaisir la venue de chaque saison, quoiqu’ils maugrèrent un peu contre l’automne, et saluent chacune comme une vieille connaissance dont l’arrivée met de la joie au cœur. La nature humaine est ainsi faite : nous aimons le changement mais nous aimons encore davantage la succession des événements auxquels nous sommes accoutumés.

Juin est aussi le mois des « vacances », le mois qui marque pour des milliers d’écoliers et d’étudiants la cessation des études et le commencement d’une période de repos dont ont besoin leurs jeunes intelligences, le mois qui permet le retour au foyer des élèves des internats et de ceux qui ont dû aller loin de leur famille travailler à se préparer une carrière.

C’est un mois aimé à juste titre de ceux qui prennent des vacances et de ceux qui n’en prennent pas, car il apporte à tous des joies et il donne à tous un peu de sa sève généreuse. Il fait couler plus vite dans les veines un sang plus généreux ; et les malheureux, qui peinent toute l’année, savent que juin les met pour tout un été à l’abri du froid et des privations, car il marque l’ouverture des grands