Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/271

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— On n’y foutrait pas des cochons. Mais c’est bien bon pour loger des hommes !

C’était vrai. On sentait maintenant, dans l’air lourd de cette journée de chaleur, passer quelque chose comme un imperceptible frisson glacé, la caresse de ce souffle froid, qui plaisait au premier abord, et devenait à la longue pénétrant comme une morsure.

Mais les Flamands étaient entrés, et quand le tumulte des embrassades et des compliments se fut calmé, tout le monde s’attabla et se mit à boire.

Ils étaient quatre, aux carrures terribles, un peu moins grands et moins larges d’épaules que le cousin, ayant, eux aussi, cet air placide de géant et cette gravité calme. Heureux de se retrouver, ils se mirent à parler le patois de leur pays, une langue rauque hérissée de mots bizarres.

Puis ils demandèrent à la jeune fille des nouvelles du pays qu’elle venait de quitter, s’informant des mariages et des enterrements, comme si c’étaient les seuls événements habituels du village.

Ils se mirent à vanter la force surprenante du cousin, trouvant des termes drôles pour peindre la stupéfaction des Lorrains nerveux au milieu desquels ils étaient transplantés, à la vue de ses tours de force. Ils racontèrent l’ahurissement du capitaine, quand il avait fallu habiller le grand corps, à qui rien n’allait des vêtements préparés d’avance. Les godillots surtout, pareils à des péniches, qu’il avait fallu fabriquer chez le maître bottier de la ville, et qu’on avait exposés à la devanture, comme des monuments destinés à ébahir les gens qui passaient. Ces jours derniers, comme on les avait employés à transporter les obus du 220, un mor-