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Cela durait depuis quelque temps, quand Pierre, trouvant un galet plus gros, le lança si habilement que l’eau rejaillit, et Thérèse en fut toute éclaboussée.

Souriante et menaçante, elle s’avança sur lui, le battoir à la main. Ses fins cheveux bruns, envolés autour de ses tempes, étaient pleins d’une poussière d’eau, doucement irisée, qui la rendait encore plus jolie. Pierre esquiva le coup de battoir lancé à toute volée, puis il lui saisit le bras. Elle se débattait, ses dents mordant sa lèvre, tandis qu’un pli volontaire creusait ses sourcils. Ils se piquaient au jeu et s’animaient plus qu’ils n’auraient voulu, étant des êtres simples, dans la première expansion de leur jeunesse et de leur force. Pierre finit par avoir le dernier ; enlevant la belle fille, comme une plume, il l’embrassa dans le cou. Alors elle s’abandonna.

Un vieux saule était proche, dont le tronc évidé formait une sorte de guérite. Ils allèrent s’y asseoir, s’adossant au bois vermoulu, qui s’effritait.

Une fraîcheur douce montait de la rivière, largement étalée sur des grèves, leur soufflant au visage la senteur fade de la vase et des eaux croupissantes. Au sortir du grand jour accablant, ils éprouvaient une sensation exquise de calme et de bien-être. Une sorte de langueur les faisait communier avec l’assoupissement des eaux : les chevaines, bondissant pour happer les insectes du soir, faisaient à la surface de grands cercles.

Si près l’un de l’autre, encore tout émus du mouvement qu’ils venaient de se donner, ils croyaient entendre les battements de leurs cœurs : leurs souffles haletants se mêlaient dans l’ombre chaude. Ils parlaient