Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/242

Cette page a été validée par deux contributeurs.

— Un gaillard membré comme vous, ça gagnerait de l’or dans not’ pays.

Et il vantait la forte stature de Pierre, cette aisance dans la force, ses bras nerveux et musclés, avec les termes brutaux d’un maquignon qui fait l’éloge d’un cheval.

— Chez nous aussi, y a de beaux hommes, mais y sont trop en graisse.

On l’invita à souper. Il refusa, sentant bien qu’il n’était pas assez familiarisé. Thérèse le reconduisit jusqu’à la passerelle et, s’étant retourné, il vit qu’elle lui jetait un baiser du bout de ses doigts fins. Puis elle porta la main à son cœur.

Ils se retrouvèrent encore le lendemain. Décidément le hasard faisait bien les choses.

Elle était venue laver son linge dans une anse du Madon, à un endroit où elle pouvait voir de loin la barque des pêcheurs.

Le sol, autour d’elle, était jonché de paille que les laveuses avaient laissée tomber de leurs hottes. Le ruisseau s’étalait sur une longue grève plate, d’où émergeaient par places de gros galets noirs. Des hochequeues sautillaient de l’un à l’autre d’un vol fantasque, et de l’eau doucement bruissante montait une buée de soleil, un vague assoupissement de lumière, où flottaient les grandes saules.

Pierre qui longeait la berge, à la recherche d’une bonne place, s’approcha à pas de loup. Le sol de gravier ne cria point sous ses espadrilles.