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humaines, qui tourbillonnent dans une ronde fantastique, accrochent leurs membres sans muscles aux branches des saules.

On dit aussi que si une fille vient se pencher sur cette eau, dans la semaine de la Chandeleur, elle y verra sûrement l’image de celui qui l’épousera.

Marthe s’attristait au bord de la source ; la légende, revenant à sa pensée, lui apportait un découragement profond.

Un village de bûcherons et de sabotiers se trouvait là, derrière les fourrés. On entendait les coqs chanter d’une voix éclatante. Le vieux Jacques Thiriet s’y rendit, ayant une affaire à traiter avec une personne de sa connaissance. Marthe refusa de l’accompagner, sous prétexte qu’elle était lasse. Le soleil inondait les taillis ; les feuillages flambaient, les cimes arrondies des hêtres reposaient mollement dans la lumière ; rien ne bougeait, pas un brin d’herbe, pas une feuille : seuls, au fond d’une clairière, des bouleaux fins frissonnaient de toute leur chevelure, sous des souffles errants, qui ne parvenaient pas jusqu’à terre.

Tout à coup un bruit de sabots claqua sur les pierres, en haut de la montée, et la vieille Dorothée apparut, tenant par la main sa petite-fille. Ayant ramassé brin par brin un fagot de bois mort, altérée par l’air étouffant qui dort sous les grands arbres, elle venait se rafraîchir à la source.

Marthe à ce moment pleurait, avec une sorte de satisfaction triste, une joie d’être seule, de pouvoir se soulager avec des larmes.

Au bruit des sanglots, la petite Anna effrayée se serrait contre sa grand’mère, cachant sa tête blonde