Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/304

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

commencement, n’oublie de se préparer à dresser le Temple digne d’abriter la fête de la totale réunion. — Ici, le premier, parlerai-je d’un inconnu. On a beaucoup remarqué que ce siècle n’a pas laissé sa trace dans l’Architecture[1]. Siècle de tentatives égarées dans tous les sens vers une fraternité spintue le alors que la lutte analytique se livrait, pouvait-il concevoir la nouveauté architecturale, le sens essentiel et premier de tout monument étant : abri pour la paix et pour l’union ? Aujourd’hui, les conditions changées, les clairvoyances éveillées permettraient ce qu’hier eût prouvé impossible, et c’est pourquoi un jeune, homme, sans l’influence d’aucune révélation que l’éclair de son propre génie et de son art compris et aimé par delà et malgré les routines d’écoles, a

créé dans l’architecture un ordre synthétique et

  1. Notons en passant que cette impuissance de l’imagination, moderne en architecture et aussi en ameublement, concuremment avec notre goût pour le vieux meuble et le bibelot exotique — goût analogue à la passion des vieillards pour les êtres très jeunes — est le plus sévère signe que le cycle actuel de la civilisation va se fermer. L’homme n’est pas une créature finie et s’il ne trouve plus rien dans la voie où il marche ce n’est pas qu’il va cesser de marcher : c’est qu’il va changer de voie. — Les créations-mêmes, telles que celles dont on par’e ci-dessus, se ressentent de la date qui sonne et l’attestent par leur caractère synthétique : ce sont des produits extrêmes, des fleurs si loin de la souche maternelle qu’elles penchent jusqu’au sol, jusqu’au plus près de la racine unique et commune, les longs rameaux fatigués.