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vants des sociétés trop mûres, bien plus actif que l’esprit critique avec lequel il arrive qu’on le confonde, sans doute parce qu’ils n’ont rien de commun, et aussi parcequ’en effet nous avons aujourd’hui cette variété admirable et qui n’a pas de sens : le Critique Dilettante, — c’est-à-dire le Critique appréciant les œuvres aux lueurs changeantes d’instables préférences. — Quant à la Critique vraie, qui suppose un esprit debout sur des principes immuables[1], on entend assez qu’elle est justement le contraire du Dilettantisme.

C’est, dis-je, le mal des fins de société, et je ne sache presque personne, aujourd’hui, qui n’en soit atteint. En quelques-uns il s’affirme davantage, il éclate. Presque toute cette génération à qui je reprochais de n’avoir pas travaillé pourrait me répondre en me montrant sa trace dans l’étrange et triste contrée. Un peu plus haut, M. Mendès l’a certainement traversée. Mais elle a un souverain. C’est M. Ernest Renan.

Je n’ai point à juger l’œuvre philosophique et religieuse de M. Renan. Toutefois, comme il m’est impossible de séparer le fond de la forme, je ne puis assez admirer que cette langue faite on ne sait de quoi, claire et légère, la plus franche qui

  1. On semble, ici, prendre l’Esprit critique pour la Critique. Mais il est bien évident que celle-ci n’est qu’un produit de celui-là. Comme elle en garde les caractères réduits, on a pu ! e personnifier en elle.