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Chrétienté actuelle et vivante ne manque jamais de faire le geste de Tartuffe devant les audaces de ces Poëtes qui prétendent la servir et qui ont du génie-! — Aussi ne sont-ils point de cette Église. Ils ont réjoint, puis dépassé Chateaubriand. Leur foi a le luisant fruste d’un objet ancien dont l’éclat se conservait sous la poussière : leur foi est retrouvée. C’est un prétexte plutôt qu’une raison — cela dit sans suspecter les sincérités qui sont évidentes — de certitude mystique : l’esprit mystique se revanche de l’esprit scientifique, qui l’avait humilié, en arrêtant à l’une des plus vieilles et des plus simples « explications de l’homme et des choses » quelques-uns des plus grands esprits du monde, qui s’asphyxiaient dans l’atmosphère pneumatique de la science seule — de la science irrespectueuse et inintelligente du Mystère — et qui recouraient aux heures larges d’antiquité où l’esprit avait de l’air... — L’important était que le mot Mystère fut répété ; il ne nous empêche pas d’entendre la réponse de Goethe, plutôt la corrobore-t-il : le sentiment du Mystère éveille et retient éveillée la passion des Causes. — Dans ce grand dialogue de la pensée moderne Chateaubriand et Faust, Goethe et le Génie du Christianisme peuvent s’entendre : ils parlent sur les sommets et leurs voix ébranlent la même atmosphère. Un jour, leurs paroles se confondront en un seul magnifique Verbe.

Stendhal, Vigny, Sénancour, Gérard de Ner-