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III. Vues sur la peine de mort communiquées par les États

16. Les contributions reçues des États Membres contenaient une somme importante d’informations exposant la position des différents États sur la peine de mort.

A. Raisons d’abolir la peine de mort ou d’instituer un moratoire sur son application

17. Certains États qui sont favorables à l’abolition ont exposé leurs raisons et leurs motifs à ce sujet. On relève six raisons fondamentales. La première invoque le respect de la vie humaine. Ainsi, Saint-Marin a indiqué qu’il place la valeur foncière de la vie humaine au-dessus du pouvoir punitif de l’État. La République bolivarienne du Venezuela indique que sa constitution dispose que le respect de la vie est l’une des valeurs suprêmes que l’État prend en considération tandis que le moratoire de facto institué par la Tunisie est fondé sur « le respect de la vie humaine ». Plusieurs États, tels que le Botswana, qui maintiennent la peine de mort, évoquent les garanties constitutionnelles relatives au droit à la vie. Quelques États, tels que Maurice, considèrent que l’abolition progressive de la peine de mort contribue à la protection et au développement progressifs des droits de l’homme. La Slovaquie considère qu’abolir la peine de mort est l’une des mesures les plus importantes qu’un pays puisse prendre pour protéger les droits de l’homme de toute personne relevant de sa juridiction.

18. La deuxième raison évoquée par les États est que la peine de mort, pas plus que toute autre sanction, n’empêche pas la criminalité. L’Italie a appelé l’attention sur des études universitaires faites en Allemagne et au Canada, selon lesquelles le nombre des meurtres a diminué après l’abolition. Amnesty International a signalé une enquête récente sur la peine de mort et le nombre des homicides, effectuée pour l’Organisation des Nations Unies en 1988 et mise à jour en 2002, qui a abouti à la conclusion suivante : « Il n’est pas prudent d’accepter l’hypothèse selon laquelle la peine capitale dissuade de commettre des meurtres dans une mesure un tant soit peu plus grande que la menace et l’application de la peine d’emprisonnement à perpétuité considérée comme moins lourde »[1]. La France estime que l’application de la peine de mort exprime moins la volonté de lutter contre la criminalité qu’elle ne traduit l’échec de la justice. L’Italie a rappelé que l’exécution a un effet passager contrairement à l’emprisonnement qui est un puissant moyen de dissuasion. Quelques États tels que la Slovénie ont estimé que le meilleur moyen de dissuasion à employer contre les crimes violents est de veiller à ce que les criminels courent fortement le risque d’être arrêtés et punis dans des délais raisonnables.

19. La troisième raison est que la peine de mort a un caractère si définitif que toute erreur du système de justice pénal est irréparable. Plusieurs États ont rappelé que les erreurs judiciaires sont inévitables quel que soit le système juridique. Amnesty International a fait observer que chaque fois que l’on applique la peine de mort, il existe un risque grave que des personnes soient exécutées pour des crimes qu’elles

  1. Roger Hood, The Death Penalty : A Worldwide Perspective (Oxford, Clarendon Press, third edition, 2002), p.230.