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de l’esprit des Lois.

extrêmement d’être ménagés. Ainsi, lorsqu’on nous fait voir toutes les marques extérieures des passions violentes, que veut-on que nous pensions de l’intérieur ? Peut-on espérer que nous, avec notre témérité ordinaire de juger, ne jugions pas ?


On peut avoir remarqué, dans les disputes & les conversations, ce qui arrive aux gens dont l’esprit est dur & difficile : comme ils ne combattent pas pour s’aider les uns les autres, mais pour se jeter à terre, ils s’éloignent de la vérité, non pas à proportion de la grandeur ou de la petitesse de leur esprit, mais de la bizarrerie ou de l’inflexibilité plus ou moins grande de leur caractere. Le contraire arrive à ceux à qui la nature ou l’éducation ont donné de la douceur : comme leurs disputes sont des secours mutuels, qu’ils concourent au même objet, qu’ils ne pensent différemment que pour parvenir à penser de même, ils trouvent la vérité à proportion de leurs lumieres : c’est la récompense d’un bon naturel.


Quand un homme écrit sur les