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De l’esprit des Lois,

affaires renaissoient de toutes parts, il les finissoit de toutes parts. Jamais prince ne sut mieux braver les dangers, jamais prince ne les sut mieux éviter. Il se joua de tous les périls, & particuliérement de ceux qu’éprouvent presque toujours les grands conquérans, je veux dire les conspirations. Ce prince prodigieux étoit extrêmement modéré ; son caractere étoit doux, ses manieres simples ; il aimoit à vivre avec les gens de sa cour. Il fut peut-être trop sensible au plaisir des femmes : mais un prince qui gouverna toujours par lui-même, & qui passa sa vie dans les travaux, peut mériter plus d’excuses. Il mit une regle admirable dans sa dépense : il fit valoir ses domaines avec sagesse, avec attention, avec économie ; un pere de famille pourroit[1] apprendre dans ses lois à gouverner sa maison. On voit dans ses capitulaires la source pure & sacrée d’où il tira ses richesses. Je ne dirai plus qu’un mot : il ordonnoit[2] qu’on vendît les

  1. Voyez le capitulaire de Willis, de l’an 800, son capitulaire II. de l’an 813, art. 6 & 19 ; & le livre V des capitulaires, art. 303.
  2. Capitulaire de Willis, art. 39. Voyez tout ce capitulaire, qui est un chef-d’œuvre de prudence, de bonne administration & d’économie.