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De l’esprit des Lois

Ces deux puissances furent très-unies, parce qu’elles ne pouvoient se passer l’une de l’autre : le pape avoit besoin des Francs, pour le soutenir contre les Lombards & contre les Grecs : Charles Martel avoit besoin du pape pour humilier les Grecs, embarrasser les Lombards, se rendre plus respectable chez lui[1], & accréditer les titres qu’il avoit, & ceux que lui ou ses enfans pourroient prendre. Il ne pouvoit donc manquer son entreprise.

S. Eucher, Evêque d’Orléans, eut une vision qui étonna les princes. Il faut que je rapporte à ce sujet la lettre[2] que les évêques, assemblés à Rheims, écrivirent à Louis le Germanique, qui étoit entré dans les terres de Charles le Chauve ; parce qu’elle est très-propre à nous faire voir quel étoit, dans ces

  1. On peut voir dans les auteurs de ces temps-là, l’impression que l’autorité de tant de papes fit sur l’esprit des François. Quoique le roi Pépin eût déjà été couronné par l’archevêque de Mayenne, il regarda l’onction qu’il reçut du pape Etienne comme une chose qui le confirmoit dans tous ses droits.
  2. Anno 858, epud Carisiacum, édit. de Baluze, tome II, page 101.