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Liv. XXII. Chap. X.

ou de l’abondance de l’argent, il faut savoir s’il y a en France plus de lettres de cinquante-quatre gros destinées pour la France, qu’il n’y a d’écus destinés pour la Hollande. S’il y a beaucoup de lettres offertes par les Hollandois & peu d’écus offerts par les François, l’argent est rare en France & commun en Hollande ; & il faut que le change hausse, & que pour mon écu on me donne plus de cinquante-quatre gros ; autrement je ne le donnerois pas, & vice versâ.

On voit que les diverses opérations du change forment un compte de recette & de dépense qu’il faut toujours solder ; & qu’un état qui doit, ne s’acquitte pas plus avec les autres par le change, qu’un particulier ne paye une dette en changeant de l’argent.

Je suppose qu’il n’y ait que trois états dans le monde, la France, l’Espagne & la Hollande ; que divers particuliers d’Espagne dussent en France la valeur de cent mille marcs d’argent, & que divers particuliers de France dussent en Espagne cent dix mille marcs ; & que quelque circonstance fît que chacun, en Espagne & en France, voulût tout-à-coup retirer son argent : que feroient les opé-