Page:Montesquieu Esprit des Lois 1777 Garnier 3.djvu/102

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
72
De l’esprit des Lois,

les mariages étant d’ailleurs adoucis par la permission de répudier ou de faire divorce, il n’y avoit qu’une très-grande corruption de mœurs qui pût porter au concubinage.

Il faut remarquer que la qualité de citoyen étant considérable dans les démocraties où elle emportoit avec elle la souveraine puissance, il s’y faisoit souvent des lois sur l’état des bâtards, qui avoient moins de rapport à la chose même & à l’honnêteté du mariage, qu’à la constitution particuliere de la république. Ainsi le peuple a quelquefois reçu pour citoyens[1] les bâtards, afin d’augmenter sa puissance contre les grands. Ainsi, à Athenes le peuple retrancha les bâtards du nombre des citoyens, pour avoir une plus grande portion du blé que lui avoit envoyé le roi d’Égypte. Enfin, Aristote[2] nous apprend que, dans plusieurs villes, lorsqu’il n’y avoit pas assez de citoyens, les bâtards succédoient ; & que quand il y en avoit assez, ils ne succédoient pas.

  1. Voyez Aristote, politique, liv. VI. Chap. iv.
  2. Ibid. livre III. chap. iii.