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EN VOYAGE

fleuve profond. Il n’aperçut bientôt plus le haut clocher dentelé d’Anvers se perdant dans la brume, et le navire fila entre les berges plates. À peine si des arbres se montraient çà et là. La pluie commença bientôt à tomber. Les nuages étaient gris et roulaient sombres et bas les uns sur les autres, emportés par le vent qui faisait fouetter l’eau. La fumée de la machine rasait le « stamboot ». À mesure que le Telegraaf approchait du grand Escaut, la lame devenait plus forte ; elle était courte mais pressée, quand tout à coup on déboucha dans le grand fleuve. À peine si on distinguait la rive opposée. Sur le navire ballotté, Pépé eut la sensation de la mer.

— Je ne suis pas fâché de pénétrer en Hollande avec ce ciel bas et pluvieux que l’on voit si souvent dans les tableaux des maîtres hollandais, pensa Pépé.

En sortant de l’Escaut, il entra dans le canal du Zuid-Beveland et voyagea entre deux hautes digues.

— Oh ! oh ! dit-il, ce n’est pas gai, ce voyage. De l’eau sur la tête, de l’eau sous ses pieds, de l’eau partout, et deux murailles vertes. Ce n’est pas du paysage.

Bientôt il entra dans un nouveau fleuve immense sur lequel des bateaux aux proues arrondies se balançaient, de chaque côté duquel les terres basses étaient semées de beaux arbres sous lesquels on apercevait des vaches brunes et blanches. Au loin, un pont long de quinze cents mètres se dessinait comme un feston de dentelle tendu sur le fleuve. Il traversait le « Moerdijk », un des bras de la Meuse.

Sur le bord de l’eau, pittoresquement placée, avec ses maisons luisantes de propreté, astiquées comme un navire, il vit Dor-