Page:Monnier - Les Contes populaires en Italie, 1880.djvu/44

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
34
CONTES POPULAIRES EN ITALIE

Gros-Jean va frapper à la porte de l’enfer ; Lucifer gronde : Qui va là ?

— Frère Gros-Jean.

Lucifer, à ce nom, hèle tous ses diables.

— Toi, dit-il à l’un, prends ton bâton ; toi, le marteau ; toi, les tenailles.

— Que voulez-vous faire de tous ces instruments ? demanda le -moine.

— Nous voulons te tuer.

— Au nom de frère Gros-Jean, tous les diables dans ma besace !

Ainsi cria le mort et, prenant son sac sur ses épaules, il le porta chez un forgeron qui avait huit ouvriers ; avec le maître, ils étaient neuf.

— Maître forgeron, combien demandez-vous pour donner pendant huit jours et huit nuits des coups de marteau sur cette besace ?

Ils fixèrent le prix de quarante onces ; ils martelèrent nuit et jour, et la besace ne s’aplatissait pas ; le moine était toujours présent. Le dernier jour le forgeron s’écria :

— Il y a ici des diables.

— Il y en a, répondit Gros-Jean, martelez fort !

L’opération faite, il reprit sa besace et l’alla vider dans une plaine ; les diables étaient tous boiteux, estropiés, et il fallut de la violence pour les faire rentrer dans l’enfer. Et le moine alla heurter de plus belle à la porte du paradis :

— Qui est là ?

— Frère Gros-Jean.

— Il n’y a pas de place pour toi.

— Mon petit Pierre, laisse-moi entrer, sans quoi je t’appelle teigneux.

— Puisque tu m’as dit teigneux, répond saint Pierre, tu n’entreras plus.