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CONTES POPULAIRES EN ITALIE

tament, et M. le professeur Segond, dans sa version récente et à tous égards si remarquable, a compris de même : « Ne mange pas le pain de l’homme dont le regard est malveillant. »

Il serait facile de multiplier les passages de l’Ancien Testament. Il y en a dans l’Ecclésiaste et dans l’Ecclésiastique mais ce qui frappait bien davantage les théologiens c’était le mot du Maitre dans la parabole des vignerons. (Math. XX, 15.) An oculus tuus nequam est quia ego bonus sum ? ou dans la traduction d’Osterwald : « Ton œil est-il malin de ce que je suis bon ? » Enfin on a commenté de bien des façons cette phrase de l’apôtre Paul adressée aux Galates : Quis vos fascinavit non obedire veritati… (Gal". III, 1.) Le grec dit bien έϐασϰάυε et fascinavit est la traduction exacte. M. Albert Rilliet qui fait autorité en pareille matière a employé le verbe français « fasciner. » La glose sur ce passage dit formellement que certains hommes ont des yeux brûlants (urentes) dont le regard seul fait du mal à autrui. Saint Thomas distingue à ce propos deux sortes de fascinations : celle qui abuse les sens par des prestiges et celle qui est soufferte par la maligne intuition des yeux (maligno oculorum intuito), dépendant, comme notre pensée n’est pas de défendre une thèse, mais de chercher la stricte vérité, nous n’avons garde de passer sous silence les opinions contraires. Saint Jérôme (tom. VII, pag. 417) écrit sur le verset de l’épître aux Galates que l’apôtre Paul n’a pas voulu désigner, n’a peut-être pas même connu le fascinum qui passe pour nuisible au yeux du vulgaire, mais qu’il s’est servi d’une expression courante afin d’être compris. Nous laissons à saint Jérôme toute la responsabilité de cette conjecture.

Il va sans dire qu’au moyen âge la foi dans la