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DU CHANTAGE À LA DÉFAITE
via Ba-ta-clan

  Sous la protection d’une flicaille toujours prête à riposter par la matraque aux regards des journalistes et photographes, son minois de naufrageur derrière l’écran des suantes petites pattes ouvertes en éventail pour le mieux cacher, M. le grand-gros-bourgeois-patriote-à-tous-crins est allé chercher quelques briques d’or. Il s’est dépêché. Il a eu bien chaud. Ouf, il peut enfin respirer. En échange de deux cent vingt billets de mille, donnant-donnant, douze kilos de métal lui ont été remis au guichet de la Banque de France. Vive la banque ! Vive la France ! Rentré chez lui, après avoir caché le magot, il a troqué l’anonymat contre une vertu fort personnelle et non moins tonitruante. Alors, il a pu rêver tout haut d’un ministère à pleins pouvoirs et réclamer à cor et à cri les mesures les plus propres à exaspérer la panique, sous prétexte de l’enrayer.

Rien ne creuse comme les heures historiques. Il n’a donc point perdu l’appétit, ce porc trop richement nourri. Et il entend ne pas rester sur sa faim. Déjà il se lèche les babines, car même aux temps les plus infâmes de sa chère union sacrée, jamais il n’eût osé songer à ce ragoût de ministres sans portefeuille que M. Buisson n’aurait su imaginer s’il n’avait eu cette longue pratique de la cuisine parlementaire.

Mais oyez plutôt, bonnes gens, la recette à Fernand le barbichu : vous prenez cette grosse tripe d’Herriot bien marinée dans un jus de petites combines et de grandes hypocrisies. Vous saupoudrez de raclures maringouines et ornez le tout d’un vieux croûton de Pétain tricolore ris-