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390- LIVRE IV, CHAPITRE X · ', téressait aux fortes lectures, et il rapporta d’Athènes, par lui conquise, les‘écrits‘d’Aristote. Il avait plutot en dédain· le Romanisme exclusif. Chez lui,‘rien de cette ·morgue épaisse qu’alTectaient envers les Grecs lesgrands person— nages'de_Bome : rien de leur solennité de nobles à esprit l borné. Il était tout laisser-aller au contraire, au grand scandale de beaucoup de ses compatriotes, se montrant - vêtu à la grecque dans les villes grecques ou poussant ses plus aristocratiques amis a monter enchar dans les jeux _ du cirque. Il `n’avait rien gardé des espérances demi-pa- triotiques, demi—égoïstes, qui, dans les pays à constitution libre, attirent les jeunes capacités vers l'arène politique z pourtant, comme tout autre, il les avait dû une fois res- sentir. Dans la vie qu’il menait, vie ballottée entre les ` ivresses 'des passions et leur froid réveil, les illusions bientot s'évanouissent. Tout désir, toute aspiration dutlui sembler folie', dans ce monde qui nesemblait gouverné que par le hasard : à spéculer sur quelque chose, c’était sur le hasard aussi qu’il lui convenaitï de spéculer. C’était un des`traits caractéristiques du siècle que de s’abandonner à la foisà l’incroyance et a la superstition : il fit comme le-siècle: Mais sa religion en matiere de prodiges n'est pas, comme celle de Marius, la foi plébéienne du charbonnier qui del · mande à prix d’argent au· pretre et des prophéties et une · règle de conduite': elle est encore·moins le fatalisme sombre de l’énergumene : elle` n'est autre que la croyance 4 à l'absurde, cette gangrène intellectuelle, envahissant nécesï ` sairement les àmes, quand elles ont perdu peu à peu con-, Iiancedans l’ordre harmonieux du monde providentiel : elle n'est que la superstition du joueur·de des heureux, . qui se dit le privilégié du sort et s’imagine qu’à· chaque coup il amènera·le numéro gagnant! Sur le terrain des faits, Sylla savait, avec son ironie habituelle, tourner à son profit lesprescriptions de la religion.-Un jour, vidant les trésors des temples de Grece,‘il s’écrie que « les res- l> sources ne peuvent manquer a celui dont les dieux rem-