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L'OCCIDENT APRÈS LA PAIX AVEC HANNIBAL
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sance se défendait péniblement contre leurs attaques furieuses; Enfin le dernier combat se donna sous Mutine : il fut long et sanglant, mais les Romains l’emporterent (56l)193 av. J.-C.. A partir de là, la lutte n'est plus une guerre, mais une chasse aux esclaves. Bientot, sur le territoire boïen, il n'y eut plus pour l’homme libre d'asile que dans le camp des légionnaires : les restes des notables s’y vinrent réfugier, et le vainqueur put, sans trop se vanter, annoncer à Rome, que de la nation des Boïes il ne subsistait plus que quelques vieillards et quelques enfants. Elle se résigna aux rigueurs de son sort. Les Romains exigèrent la moitié du territoire (563)191. Ils ne pouvaient éprouver de refus, mais même dans les limites réduites qui leur furent assignées, les Boïes disparurent vite et se noyèrent dans le peuple vainqueur[1].
Ayant ainsi fait table rase dans la Cisalpine, les Romains réinstallèrent les forteresses de Plaisance et de Crémone, dont les dernières années de la guerre avaient

  1. Selon le dire de Strabon, les Boïes d’ltalie refoulés par Rome au delà des Alpes, auraient fonde un établissement nouveau dans les plaines de la Hongrie actuelle, entre les lacs de Neusiedel et Balaton [Volcaeae paludes] : puis attaqués, au temps d’Auguste, par les Gètes venus d'au delà du Danube, ils auraient été entierement détruits. Leur dernière patrie aurait gardé après eux le nom de Désert Boïen. [deserta Boîorumj. Ce récit concorde mal avec celui plus authentique des Annales romaines. Selon celles-ci, Rome se serait contentée de confisquer la moitié du territoire des Boîes au sud du Po. Pour expliquer la prompte disparution de ce peuple, il n’est nullement besoin d’une expulsion violemment consommée. Les autres races celtiques, bien moins que les Boïes, attaquées par la guerre et la colonisation, disparaissent tout aussi vite et aussi complètement de la liste des nations italiennes. D’autres documents rattachent d’ailleurs l’origine des Boies du lac Balaton a la souche mère de ce peuple, implantée jadis en Bavière et en Bohème, et poussée plus tard vers le sud par l'invasion des tribus germaniques. Ajoutons qu’il est douteux que tous les Boïes, que l'on retrouve aux environs de Bordeaux, sur le Pô et en Bohème. aient appartenu jamais à une seule et même race, un jour dispersée. ll n’y a là peut-étre rien de plus qu'une ressemblance de nom. Dans cette hypothèse, le récit de Strabon se baserait uniquement sur cette concordance fortuite. Il en aurait déduit le fait des origines, sans autrement l’approfondir. Les anciens en agissaient ainsi, souvent: témoins leurs traditions sur les Cimbres, les Vénètes, et tant d’autres.