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grecque au sentiment tout·puissant de la nationalité romaine : beau causeur, et de mœurs aimables, il gagna tous les cœurs, ceux des soldats et des femmes, ceux de ses Romains et des Espagnols, ceux de ses adversaires dans le Sénat, et celui même du héros carthaginois , plus grand que lui , qu’il aura un jour à combattre. A peine il est nommé, que son nom vole de bouche en bouche : il sera l’étoile qui mènera les Romains à la victoire et à la paix.

P. Scipion se rend donc en Espagne (544-545), accompagne du propréteur Marcus. Sélanus, qui remplacera Néron, et assistera le jeune capitaine de la main et du conseil. Il emmène aussi Guius Lœlius, son chef de la flotte et son affidé, et débarque avec une légion exceptionnellement renforcée et sa caisse bien remplie. Son début est aussitôt marqué par l’un des plus hardis, des plus heureux coups de main dont l’histoire ait perpétué le souvenir. Les trois armées carthaginoises étaient postées loin les unes des autres. Hasdrubal Barca gardait les hauteurs ou nait le Tage : Hasdrubal, fils de Cisgon, se tenait à son embouchure : Magon campait aux colonnes d’Hercule. Le plus rapproché de Carthagène en était encore à dix jours de marche. Soudain, aux premiers jours du printemps de 545, avant qu’aucun des corps ennemis n’ait bougé, Scipion fait une pointe sur la ’capitale phénicienne, qu’il lui est facile, en quelques jours, d’atteindre en suivant la côte depuis les bouches de l’Èbre. Il a avec lui toute son armée, trente mille hommes environ, et toute sa flotte : il surprend, il attaque à la fois, et par mer et par terre, la faible garnison d’un millier d’hommes à peine, que les Carthaginois ont laissée dans la ville. Celle-ci, placée sur une langue étroite se projetant dans la rade, est investie de trois côtés par les navires; elle est menacée par les légions du quatrième côté : tout secours est loin. Le