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L’ART

portance. Lorsqu’un citoyen était porté dans la tombe, une femme choisie parmi ses amis ou ses parents suivait la bière, et chantait la chanson des funérailles accompagnée par un joueur de flûte (nenia). Le père de famille allait-il prendre part à un festin, l’usage voulait qu’il se rendît chez son hôte avec son cortège de jeunes garçons. Pendant le repas, ceux-ci célébraient tour à tour les aïeux de leur patron, tantôt accompagnés par la flûte, et tantôt déclamant à voix seule (assa voce canere)[1]. Enfin, les hommes chantaient aussi à tour de rôle dans les repas ; mais c’était là sans doute un usage emprunté plus tard aux Grecs. Des chants des aïeux rien ne nous est parvenu, mais il va de soi qu’ils retraçaient et récitaient leurs exploits ; et que sous ce rapport ils sortaient souvent du genre purement lyrique, pour entrer dans le domaine de l’épopée.

Mascarades.L’élément poétique se manifestait aussi dans les fêtes, et les danses joyeuses ou saturœ (p. 39) du carnaval populaire, dont l’usage remonte, sans aucun doute, à l’époque antérieure à la séparation des races. Les chants ne faisaient pas défaut dans ces jeux, accompagnement ordinaire et tout d’action des fêtes publiques, des noces, etc. On y voyait plusieurs danseurs ou plusieurs bandes de danseurs mêler leurs pas et leurs figures ; et les chants s’y modulaient en une sorte de drame, où naturellement dominaient la plaisanterie, souvent même la licence la plus effrénée. Telle fut l’origine des chansons à couplets alternés, connues plus tard sous le nom de fescennines[2], et de cette comédie populaire primitive, dont le germe rencontra un terrain excel-

  1. [In conviviis pueri modesti ut cantarent carmina antiqua, in quibus laudes erant majorum, et assa voce, et cum tibicine — Varr., de vit. pop. R., lib. 2.]
  2. [Fescennina per hunc inventa licencia morem.
    Versibus alternis opprobria rustica fudit. — Hor. ép. 2, 1, 145.]