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LIVRE I, CHAP. XI

blissement concédé de bonne heure aux Latins (p. 141), et, vers le même temps, la validation des mariages civils (p. 119). Il faut donc bien reconnaître que si, à Rome, l’État demandait tout au citoyen, s’il portait aussi haut qu’il a été jamais fait ailleurs, la notion de l’assujettissement de l’individu à la société, il n’a réussi et n’a pu réussir dans cette tentative qu’en renversant, d’un autre côté, les barrières du commerce, et en dégageant partout cette même liberté qu’il enchaînait dans le système gouvernemental. Qu’elle accorde ou qu’elle refuse, la loi est toujours absolue : si l’étranger est « comme la bête chassée par les chiens, » l’hôte est l’égal du citoyen. Le contrat n’engendre point l’action par lui-même ; mais, si le droit du créancier vient à être reconnu, il est aussitôt tout-puissant. Point d’excuse ni de salut, même pour le pauvre : nulle humanité, nulle juste compassion. Il semble que le législateur ait pris plaisir à ériger partout en loi les deux extrêmes ; à pousser jusqu’au bout les conséquences les plus impitoyables ; à imposer violemment, aux plus dures intelligences, la tyrannie de ses principes absolus. Les Romains ignorent les formes poétiques, les naïves et suaves images qui sont la parure des anciennes coutumes germaines ; chez eux, tout est clair et précis : point de symbole oiseux ; point de disposition inutile. Leur loi n’est pas cruelle : elle ne dit et ne fait que le nécessaire : elle ordonne la mort sans phrases ; jamais, à cette époque, elle n’a permis la question contre l’homme libre, la question, dont il a fallu tant de siècles pour proclamer l’abolition chez les modernes ! Le vieux droit du peuple romain, si inflexible, si effrayant dans ses rigueurs, n’allait pas s’adoucissant, qu’on se garde de le croire, sous les tempéraments d’une pratique plus humaine ; tel n’est jamais l’usage des codes populaires. Il autorisa longtemps ces rangées de cachots, tombes