Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 1.djvu/201

Cette page a été validée par deux contributeurs.
181
LES HELLÈNES, L’EMPIRE DES MERS

commencé entre les deux peuples semblera beaucoup plus reculée encore.

Caractère de l’immigration grecque.L’histoire de la Grèce siculo-italienne ne fait pas partie de l’histoire italique : les colons grecs de l’Ouest restèrent en rapports quotidiens avec la mère patrie, prenant part à toutes les fêtes nationales, exerçant tous leurs droits comme Hellènes. Il n’en est pas moins utile de rechercher les divers caractères des colonies grecques, et d’y retrouver les sources multiples et variées de leur influence sur la civilisation de l’Italie.

Ligue des villes achéennes.Parmi tous ces établissements, il n’en est pas où le système des institutions soit aussi exclusif, aussi concentré que celui d’où sortit la ligue des villes achéennes. Elle se composait des villes de Siris, Pandosie, Metabus [ou Métapontion, Métaponte], Sybaris, avec ses colonies de Posidonie et Laos, Crotone, Caulonia, Temesa, Terina, et Pyxus[1]. Les colons en appartenaient, pour la plupart, à une race hellénique, qui conserva obstinément son dialecte propre, différent du dorien, son voisin, sous plusieurs rapports et notamment par l’absence de la

    pelle encore la nation des Grecs ; mais cette appellation, déjà repoussée avec affectation, est subordonnée à celle d’Hellènes. Celle-ci n’apparaît point encore dans Homère. À l’exception d’Hésiode, on ne la rencontre, pour la première fois, que dans Archiloque, vers l’an 50 de Rome ; mais elle remonte évidemment à une date beaucoup plus ancienne (Duncker, Gesch. d. Alterth. (Hist. de l’Antiquité), 3, 18, 556) Ainsi, dès avant ce temps, les Italiens connaissaient assez les Grecs pour leur donner, non pas le nom d’une des familles grecques, mais le nom générique de la nation. Maintenant, comment concilier ce fait avec cette autre assertion, qu’un siècle avant la fondation de Rome, l’Italie était absolument inconnue aux Grecs de l’Asie-Mineure ? Nous parlerons plus loin de l’alphabet ; son histoire nous conduira au même résultat et la même contradiction. On nous trouverait téméraires, si nous nous permettions de rejeter, par les motifs qui précèdent, les indications d’Hérodote en ce qui touche le siècle d’Homère ; mais n’est-on pas bien plus hardi en décidant la question sur la foi de la seule tradition ?

  1. [Voici les noms modernes de ces diverses localités : Torre di Senna (Calabre) ; Anglona (Calabre) ; Torre di Mare, côté est des Calabres, près des bouches du Bradano ; Pœstum ; Laüs, Laïno, au sud du golfe de Policastro ; Cotrone ; Castelvetere ; Torre di Nocera ; Sainte-Euphémie, sur la baie de ce nom ; Policastro.]