Page:Mommsen - Histoire romaine - Tome 1.djvu/194

Cette page a été validée par deux contributeurs.
174
LIVRE I, CHAP. X

elle n’introduisait pas l’élément civilisateur au milieu des Italiques. C’est aux nations maritimes de l’Orient que revient la gloire d’avoir donné à l’Italie tout ce qu’elle a reçu du dehors, en fait de culture étrangère.

Les Phéniciens en Italie.Le plus ancien des peuples civilisés de la Méditerranée, le peuple Égyptien, ne se risquait pas encore sur les mers : son influence directe sur l’Italie a été nulle. Les Phéniciens ne firent pas davantage pour elle. Les premiers, ils quittèrent leur patrie et l’étroite bande de terre qu’ils occupaient ; et ils allèrent, sur leurs maisons flottantes, se mêler à toutes les races connues. Se lançant à la recherche des poissons, des coquillages utiles ; puis bientôt s’ouvrant toutes les voies du commerce, les premiers, ils coururent les mers dans tous les sens, et se répandirent avec une incroyable rapidité jusque dans les stations les plus reculées de la Méditerranée occidentale. Ils précèdent les Grecs presque partout, dans les ports grecs même, en Crète, à Chypre, en Égypte, en Lybie, en Espagne, et aussi dans les régions maritimes, à l’ouest de l’Italie. Thucydide rapporte qu’avant la venue des Hellènes, ou tout au moins avant leurs émigrations et l’établissement de leurs colonies, les Phéniciens avaient déjà fait le tour de la Sicile, fondé des comptoirs sur ses caps et dans les îles adjacentes, n’occupant pas les terres et se contentant du commerce avec les indigènes[1]. Avec le continent italique ils n’agissent pas de même ; on n’y a jamais connu sûrement qu’une seule colonie phénicienne, la factorerie de Cœré, dont le souvenir s’est conservé dans le nom d’une petite localité voisine (Punicum), située sur la côte, et dans le second nom de Cœré elle-même ; Agylla[2] qui n’a rien de Pélasge, quoi qu’en dise la fable, est purement phé-

  1. [Thucyd., VI, 2.]
  2. [Auj. Cervetri (Cœre vetere).]