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vous confondre, qu’il y a seize ans pour le moins que l’homme dont vous nous parlez périt sur mer avec ses enfants et sa femme en voulant dérober leur vie aux cruelles persécutions qui ont accompagné les désordres de Naples, et qui en firent exiler plusieurs nobles familles.

Valère

Oui ; mais apprenez, pour vous confondre, vous, que son fils, âgé de sept ans, avec un domestique, fut sauvé de ce naufrage par un vaisseau espagnol, et que ce fils sauvé est celui qui vous parle. Apprenez que le capitaine de ce vaisseau touché de ma fortune, prit amitié pour moi, qu’il me fit élever comme son propre fils, et que les armes furent mon emploi dès que je m’en trouvai capable ; que j’ai su depuis peu que mon père n’était point mort, comme je l’avais toujours cru ; que, passant ici pour l’aller chercher, une aventure par le ciel concertée me fit voir la charmante Elise ; que cette vue me rendit esclave de ses beautés, et que la violence de mon amour et les sévérités de son père me firent prendre la résolution de m’introduire dans son logis et d’envoyer un autre à la quête de mes parents.

Anselme

Mais quels témoignages encore, autres que vos paroles, nous peuvent assurer que ce ne soit point une fable que vous ayez bâtie sur une vérité ?

Valère

Le capitaine espagnol, un cachet de rubis qui était à mon père, un bracelet d’agate que ma mère m’avait mis au bras, le vieux Pedro, ce domestique qui se sauva avec moi du naufrage.

Mariane

Hélas ! à