Page:Molière - Œuvres complètes, Garnier, 1904, tome 03.djvu/193

Cette page n’a pas encore été corrigée

lle
Je vous le donnerais en bien des fois, Monsieur, à deviner, le stratagème dont nous nous servons auprès de Monsieur Jourdain, pour porter son esprit à donner sa fille à mon maître.

Dorante
Je ne devine point le stratagème ; mais je devine qu’il ne manquera pas de faire son effet, puisque tu l’entreprends.

Covielle
Je sais, Monsieur, que la bête vous est connue.

Dorante
Apprends-moi ce que c’est.

Covielle
Prenez la peine de vous tirer un peu plus loin, pour faire place à ce que j’aperçois venir. Vous pourrez voir une partie de l’histoire, tandis que je vous conterai le reste.

Six Turcs entrent gravement deux à deux, au son de tous les instruments. Ils portent trois tapis fort longs, dont ils font plusieurs figures, et, à la fin de cette première cérémonie, ils les lèvent fort haut ; les Turcs musiciens, et autres joueurs d’instruments, passent par dessous ; quatre Derviches qui accompagnent le Mufti ferment cette marche.

Alors les Turcs étendent les tapis par terre, et se mettent dessus à genoux ; le Mufti est debout au milieu, qui fait une invocation avec des contorsions et des grimaces, levant le menton et remuant les mains contre sa tête comme si c’était des ailes. Les Turcs se prosternent jusqu’à terre, chantant Alli, puis se relèvent, chantant Alla, ce qu'ils continuent alternativement jusqu’à la fin de l’invocation ; puis ils se lèvent tous, chantant Alla ekber.

Alors les Derviches amènent devant le Mufti le Bourgeois vêtu à la turque, rasé, sans turban, sans sabre, auquel il chante gravement ces paroles :


Le Mufti
Se ti sabir,
Ti respondir ;