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que vous festinez les dames en mon absence, et que vous leur donnez la musique et la comédie, tandis que vous m’envoyez promener ?

Dorante
Que voulez-vous dire, Madame Jourdain ? et quelles fantaisies sont les vôtres, de vous aller mettre en tête que votre mari dépense son bien, et que c’est lui qui donne ce régal à Madame ? Apprenez que c’est moi, je vous prie ; qu’il ne fait seulement que me prêter sa maison, et que vous devriez un peu mieux regarder aux choses que vous dites.

Monsieur Jourdain
Oui, impertinente, c’est Monsieur le Comte qui donne tout ceci à Madame, qui est une personne de qualité. Il me fait l’honneur de prendre ma maison, et de vouloir que je sois avec lui.

Madame Jourdain
Ce sont des chansons que cela : je sais ce que je sais.

Dorante
Prenez, Madame Jourdain, prenez de meilleures lunettes.

Madame Jourdain
Je n’ai que faire de lunettes, Monsieur, et je vois assez clair ; il y a longtemps que je sens les choses, et je ne suis pas une bête. Cela est fort vilain à vous, pour un grand seigneur, de prêter la main comme vous faites aux sottises de mon mari. Et vous, Madame, pour une grande Dame, cela n’est ni beau ni honnête à vous, de mettre de la dissension dans un ménage, et de souffrir que mon mari soit amoureux de vous.

Dorimène
Que veut donc dire tout ceci ? Allez, Dorante, vous vous moquez, de m’exposer aux sottes visions de cette extravagante.

Dorante
Madame, holà ! Madame, où courez-vous ?

Monsieur Jourdain
Madame ! Monsieur le Comte, faites-lui excuses, et tâchez de la ramener. Ah ! impertinente que vous êtes ! Voilà de vos beaux faits ; vous