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XVII MOLIÈRE ET LA COMÉDIE

originale ; le Joueur et le Légataire sont d’excellentes comédies ; le Glorieux, la Métromanie, et le Méchant ont des beautés d’un autre ordre. Mais rien de tout cela n’est Molière : il a un trait de physionomie qu’on n’attrape point ; on le retrouve jusque dans ses moindres farces, qui ont toujours un fonds de vérité et de morale. Il plaît autant à la lecture qu’à la représentation, ce qui n’est arrivé qu’à Racine et à lui ; et même, de toutes les comédies, celles de Molière sont à peu près les seules que l’on aime à relire. Plus on connaît Molière, plus on l’aime ; plus on étudie Molière, plus on l’admire. Après l’avoir blâmé sur quelques articles, on finit par être de son avis : c’est qu’alors on en sait davantage. Les jeunes gens pensent communément qu’il charge trop : j’ai entendu blâmer le pauvre homme ! répété si souvent. J’ai vu depuis précisément la même scène, et plus forte encore ; et j’ai compris que, lorsqu’on peignait des originaux pris dans la nature, et non pas, comme autrefois, des êtres imaginaires, l’on ne pouvait guère charger ni les ridicules ni les passions. IV

Il faut pardonner à Molière si dans ses deux premières pièces, l’Étourdi et le Dépit amoureux, il suivit la route vulgaire avant d’en frayer une nouvelle. Les ressorts forcés et la multiplicité d’incidents dénués de toute vraisemblance excluent ces deux pièces du rang des bonnes comédies. Il y a même une inconséquence marquée dans le plan de l’Étourdi : c’est que, son valet ne lui faisant point part des fourberies qu’il médite, il est tout simple que le maître les traverse sans être taxé d’étourderie. On voit trop que l’auteur voulait à toute force amener des contre-temps : aussi a-t-il joint ce titre à celui de l’Étourdi, ce qui ne répare point le vice du sujet. Mais, si les plans de Molière étaient encore aussi défectueux que ceux de ses contemporains, il avait déjà sur eux un grand avantage : c’était un dialogue plus naturel et plus raisonnable, et un style de meilleur goût. Ce mérite et la gaieté du rôle de Mascarille ont soutenu cette pièce au théâtre, malgré tous ses défauts. Il n’y en a pas moins dans le Dépit amoureux. Le sujet est absolument incroyable : toute l’intrigue roule sur une supposition inadmissible, qu’un homme s’imagine être marié avec la femme qu’il aime, le lui soutienne à elle-même, et soit marié en effet avec une autre. Dans l’état des choses tel que l’auteur l’établit, et tel que la décence ne