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Scène V.

ORGON, CLÉANTE, DORINE.
ORGON.

Et, s’il falloit… Il entre.Ah ! mon frère, bonjour.

CLÉANTE.

Je sortois, et j’ai joie à vous voir de retour.
La campagne à présent n’est pas beaucoup fleurie.

ORGON.

À Cléante.

Dorine… Mon beau-frère, attendez, je vous prie.
Vous voulez bien souffrir, pour m’ôter de souci,
Que je m’informe un peu des nouvelles d’ici.

À Dorine.

Tout s’est-il, ces deux jours, passé de bonne sorte ?
Qu’est-ce qu’on fait céans ? comme est-ce qu’on s’y porte ?

DORINE.

Madame eut avant-hier la fièvre jusqu’au soir,
Avec un mal de tête étrange à concevoir.

ORGON.

Et Tartuffe ?

DORINE.

Tartuffe ! il se porte à merveille,
Gros et gras, le teint frais et la bouche merveille.

ORGON.

Le pauvre homme !

DORINE.

Le soir elle eut un grand dégoût.
Et ne put, au souper, toucher à rien du tout,
Tant sa douleur de tête étoit encor cruelle !

ORGON.

Et Tartuffe ?

DORINE.

Il soupa, lui tout seul, devant elle ;
Et fort dévotement il mangea deux perdrix,
Avec une moitié de gigot en hachis.

ORGON.

Le pauvre homme !