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SBRIGANI.

Ah ! c’est une autre chose ; et je vous demande pardon.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Qu’est-ce que cela veut dire ?

SBRIGANI.

Rien.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Mais encore ?

SBRIGANI.

Rien, vous dis-je. J’ai un peu parlé trop vite.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Je vous prie de me dire ce qu’il y a là-dessous.

SBRIGANI.

Non : cela n’est point nécessaire.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

De grâce.

SBRIGANI.

Point. Je vous prie de m’en dispenser.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Est-ce que vous n’êtes pas de mes amis ?

SBRIGANI.

Si fait. On ne peut pas l’être davantage.

MONSIEUR de POURCEAUGNAC.

Vous devez donc ne me rien cacher.

SBRIGANI.

C’est une chose où il y va de l’intérêt du prochain.

MONSIEUR DE POURCEAUGNAC.

Afin de vous obliger à m’ouvrir votre cœur, voilà une petite bague que je vous prie de garder pour l’amour de moi.

SBRIGANI.

Laissez-moi consulter un peu si je le puis faire en conscience. (Après s’être un peu éloigné de monsieur de Pourceaugnac.) C’est un homme qui cherche son bien, qui tâche de pourvoir sa fille le plus avantageusement qu’il est possible ; et il ne faut nuire à personne. Ce sont des choses qui sont connues, à la vérité ; mais j’irai les découvrir à un homme qui les ignore ; et il est défendu de scandaliser son prochain. Cela est vrai ; mais, d’autre part, voilà un étranger qu’on veut surprendre, et qui, de bonne foi, vient se marier avec une fille qu’il ne connoît pas et qu’il n’a jamais vue ; un gentilhomme plein de franchise, pour qui je me sens de l’inclination, qui me