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Qui, dans nos soins communs pour ce jeune miracle,
Aux vœux de son rival portera plus d’obstacle :
Préparez vos efforts, et vous défendez bien,
Sûr que de mon côté je n’épargnerai rien.


SCÈNE II. - LÉLIE, MASCARILLE.
Lélie.

Ah ! Mascarille !

Mascarille.

Ah ! Mascarille !Quoi ?

Lélie.

Ah ! Mascarille ! Quoi ?Voici bien des affaires ;
J’ai dans ma passion toutes choses contraires :
Léandre aime Célie, et, par un trait fatal,
Malgré mon changement, est encor mon rival[1].

Mascarille.

Léandre aime Célie !

Lélie.

Léandre aime Célie !Il l’adore, te dis-je.

Mascarille.

Tant pis

Lélie.

Tant pis.Hé, oui, tant pis ; c’est là ce qui m’afflige.
Toutefois j’aurois tort de me désespérer ;
Puisque j’ai ton secours, je puis me rassurer;
Je sais que ton esprit, en intrigues fertile,
N’a jamais rien trouvé qui lui fût difficile;
Qu’on te peut appeler le roi des serviteurs,
Et qu’en toute la terre…

Mascarille.

...................................... Hé ! trève de douceurs,
Quand nous faisons besoin, nous autres misérables,
Nous sommes les chéris et les incomparables ;
Et dans un autre temps, dès le moindre courroux,
Nous sommes les coquins qu’il faut rouer de coups.

Lélie.

Ma foi ! tu me fais tort avec cette invective.
Mais enfin discourons un peu de ma captive :
Dis si les plus cruels et plus durs sentiments

  1. Var. Malgre mon changement est toujours mon rival